D’après l’Association Française d’Urologie (AFU – 1), ”La néphropathie aux produits de contraste iodés (PCI) est une insuffisance rénale aiguë par nécrose tubulaire aiguë liée à des modifications hémodynamiques intrarénales et à une toxicité tubulaire directe de l’iode sur le rein. L’augmentation du nombre des procédures radiologiques (diagnostiques et thérapeutiques) avec utilisation de PCI a entraîné une augmentation de l’incidence a cette néphropathie qui est actuellement la troisième cause (11%) d’insuffisance rénale aiguë en milieu hospitalier (2). » Le débat est donc clos ? Les produits de contraste sont donc à bannir chez les patients souffrant d’une Clearance diminuée ? Habite du ce site, vous savez ou nous voulons en venir…. L’heure est à la lyse de dogme, soit « dogmalyse ».
Merci à Aycock et al. ainsi qu’a Salim Rezaie et Anand Swaminathan pour leur contribution et inspiration à ce sujet. Et à Dr. Leopold Casper (1859 – 1959 ✝) pour l’illustration (répertoriée par biomedicalephemera).
L’utilisation du produit de contraste lors d’examen CT permet à l’urgentiste de détecter certaines pathologies sinon « invisible » sans cet apport de contraste, avec un effet potentiellement néfaste sur le devenir du patient sans ce diagnostic. Il est donc regrettable de régulièrement voir des CT fait aux Urgences ou l’indication au contraste est posée (organe viscéraux et pelvien, structures vasculaire, tumeurs (y compris cérébrales)) mais ou le dogme de l’Insuffisance Rénale (IR) intervient et l’examen est soit réalisé sans contraste (et un deuxième examen deviens ultérieurement nécessaire, augmentant la radiation assujettie au patient ainsi que les couts) soit pas réalisé du tout (pas acceptable, a notre avis). Mais ce dogme d’IRA associes aux PCI est-il evidence-based ? Y-a-t ‘il réellement une raison de repousser un examen/réaliser un examen incomplet/non adéquat ? Aycock et al., dans leur article d’Aout 2017 dans le Annals of Emergency Medicine, ont chercher les preuves dans la littérature.
IRA sur simple produit de contraste… ou mulitfactoriel… (d’après Gleeson et al.)
Dans leur revue systématique et méta-analyse de la littérature publiée (14,691 articles !), littérature répondant aux critères de recherches « taux d’IRA », « nécessite de dialyse » et « mortalité » suite à l’utilisation de PCI pour un CT vs CT sans PCI, les auteurs ont cherché à déterminer (primary outcome) le risque d’IRA subséquente et (secondary outcome) le taux de recours a une dialyse et/ou mortalité toute cause confondue. Les études sur l’utilisation de PCI dans un CT ont but thérapeutique (« interventionnel »), interventions pédiatrique, injection artérielle de PCI (cf. interventionnelle y compris angiographie coronaire percutanée), les études ou une stratégie de prévention ont été mise en place (N-Acétylcystéine, NaBic, hydratation pré examen, etc.), ainsi que les case reports/guidelines cliniques/autres méta-analyse et articles de revues ont tous été exclues.
De ces 14,691 articles (dont 28 avec plus de 107,000 patients !), 6 se focalisaient sur les Urgences, 7 sur les Soins Intensifs, seulement 1 n’utilisait pas une solution de contraste a basse- voir iso-osmolaire (pour les old-school d’entre nous, ces PCI basse- ou iso-osmolaire sont désormais monnaie courante dans tous les départements due au fait qu’ils sont moins toxiques), et 82% des études ont inclus des patients avec une IRC en place (donc si prouve, IRA sur IRC).
Et les résultats, qu’en est-il ?
D’après la revue de la littérature (organisée, répondant aux critères internationaux PRISMA et MOOSE), les auteurs conclus que l’utilisation du produit de contraste pour un CT :
- n’est pas associe à une augmentation du taux d’IRA (Odds Ratio 0.94, 95% CI 0.83 – 1.07)
- n’est pas associe à une augmentation de la nécessite de dialyse (Odds Ratio 0.83, 95% CI 0.59-1.16)
- n’est pas associe à une augmentation de la mortalité (Odds Ratio 1.0, 95% CI 0.73 – 1.36)
Bien évidemment, cette méta-analyse reste une revue d’études observationnelles, et certains biais (ex. un patient avec une IRC sévère aurait pu être exclue d’une des études, et n’aurais du coup pas reçue de produit de contraste), et la nature rétrospective diminuent la force des résultats (de plus, la majorité des études en questions ont été faite sur des patients admis/hospitalise par la suite, ce qui peut avoir un biais sévère sur le taux réel de complications/IRA/MOF/Dialyse par rapport à une population générale comme celle vue aux Urgences, une grande proportion n’étant pas hospitalise post examen). Néanmoins, la conclusion des auteurs est acceptable : il n’y a actuellement pas d’évidence qu’un examen CT avec PCI augmente le risque de IRA/Dialyse/Mortalité par rapport à un examen sans PCI. Cette méta-analyse, malgré ses défauts (rétrospective, base sur des études observatrices, hétérogénéité des protocoles d’études, des définitions de l’IRA), est un solide clou dans le cercueil de l’argument « IRA donc pas de produit de contraste ». Evidement une étude prospective randomisée à grande échelle serait l’ultime, mais l’on n’est pas près de voir une commission d’éthique accepter un tel protocole. De ce fait, on peut actuellement déduire de cette met analyse qu’il n’y pas d’influence des produits de contrastes sur l’IRA lors d’un CT (de plus, en vue d’un taux similaire d’IRA post-examen, la composante multifactoriel et MOF (a niveau variable) est probablement plus responsable que le PCI pour le développement d’une IRA)
CAVE : L’AFU, citée en début de ce post, mentionne qu’il existe un risque vis à vis de l’IRA et des PCI lors de procédures thérapeutiques et non-diagnostique – cette étude ne prouve rien vis-à-vis de cette indication – les propos de l’AFU ne sont donc pas prouve faux.
Bibliographie
- Audard V. Néphropathie aux Produits de Contraste Iodés. Progrès FMC, 2007, 17 (4): 14-17
- Nash K et al. Hospital-acquired renal insufficiency. Am J Kidney Dis.2002, 39: 930-6
- Aycock RD et al. Acute Kidney Injury After Computed Tomography: A Meta-Analysis. Ann. Emerg Med. 2017 Aug 12. pii: S0196-0644(17)30881
- Salim Rezaie, Anand Swaminathan http://rebelem.com/contrast-induced-nephropathy-cin-really-not-thing/
- Gleeson TG, Bulugahapitiya S. Contrast–induced nephropathy. AJR 2004; 183:1673-1689